Pessah en Israël : pèlerinage en Terre sainte

Qui sont ces touristes qui choisissent de venir en Israël pour Pessah ? D’où viennent-ils ? Où vont-ils ? Que font-ils ? Autant de questions auxquelles nous avons tenté de répondre

Pessah en Israël : pèlerinage en Terre sainte (photo credit: REUTERS)
Pessah en Israël : pèlerinage en Terre sainte
(photo credit: REUTERS)

 Pessah constitue avec Shavouot et Souccot, l’une des trois fêtes de pèlerinage. Elle repose sur des fondements bibliques – le souvenir de la sortie d’Egypte du peuple hébreu – mais aussi agraires, la célébration du printemps et le début de la moisson de l’orge.

A l’époque biblique, les pèlerinages au Temple de Jérusalem constituaient un commandement pour les Juifs. Aujourd’hui, les croyants de la planète continuent de se rendre en Terre promise pour les fêtes, et en particulier, à Jérusalem.
 Pessah se célèbre à partir du 15 Nissan, pendant 7 jours en Israël et 8 jours en diaspora, soit cette année, du 14 au 21-22 avril. En Israël et pour les communautés réformées, le premier et le dernier jour sont fériés, tandis que pour les autres communautés de diaspora les deux premiers et deux derniers jours sont des Yamim tovim, jours de fête.
 A l’époque du Temple, le rituel de Pessah se réduisait au sacrifice de l’agneau et à la consommation de pain non levé, mais après sa destruction et donc l’impossibilité de continuer à faire des sacrifices, les rabbins ont dû réinventer le rituel. Ils se sont alors inspirés des prescriptions du texte biblique : l’agneau pascal, une fois sacrifié, doit faire l’objet d’un repas. C’est l’apparition du Seder, dont le déroulement a été formulé pour la première fois dans la Michna (traité Pessahim), repas festif en souvenir de la sortie d’Egypte. Il est célébré les deux premières nuits de Pessah en diaspora et la première nuit seulement en Israël. C’est l’un des rituels les plus observés au sein du peuple juif et l’un des plus importants symboliquement.
Pessah nécessite également un nettoyage méticuleux de la maison pour respecter l’interdiction absolue de consommer la moindre miette de hamets (tout aliment levé ou fermenté).
 Pour les chrétiens, la semaine sainte qui célèbre la mort et la résurrection de Jésus commence avec le dimanche des Rameaux (dimanche précédant Pâques) et s’achève avec la célébration de Pâques, le dimanche suivant. Elle aura lieu cette année du 13 au 20 avril. Si, en principe, les calendriers catholiques et orthodoxes diffèrent, en 2014, comme en 2011, les Eglises d’Orient et d’Occident célébreront Pâques le même jour.
Chaque Vendredi saint, plusieurs dizaines de milliers de chrétiens du monde entier effectuent un pèlerinage à Jérusalem, dans le secteur oriental à majorité arabe.

 Au programme : prière à chacune des quatorze stations de la Via Dolorosa, le chemin de croix que Jésus emprunta en portant une croix sur l’épaule avant d’être crucifié par les Romains et, selon les Ecritures, de ressusciter le matin de Pâques. Le chemin de croix débute au couvent franciscain de la Flagellation pour aboutir à l’église du Saint-Sépulcre, considérée traditionnellement comme le tombeau de Jésus et devenue le haut lieu du christianisme.

Un seder au soleil

 Selon le ministère du Tourisme, environ 150 000 visiteurs sont venus en 2013 sur la période de Pessah-Pâques. 53 % % d’entre eux étaient chrétiens (dont la moitié catholiques) et 28 % juifs.

« Les touristes juifs viennent principalement des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de France pour passer du temps avec leurs familles et leurs amis », explique Lydia Weitzman, conseillère pour la presse étrangère au ministère du Tourisme.
 Pour Mark Feldman, directeur de l’agence de voyage américaine Ziontours, basée à Jérusalem, ce sont principalement des juifs et des chrétiens religieux qui viennent pendant cette période. Lui aussi note que les trois nationalités principales sont les Américains, les Britanniques et les Français. Quant aux destinations phares, il différencie : « Les Américains et les Britanniques [qui] ont tendance à opter pour Jérusalem et les Français [qui] se divisent en deux groupes : les plus religieux se rendent à Jérusalem, les plus laïcs privilégient la côte : de Ashkelon à Nahariya en passant par Tel-Aviv ou Haïfa. Les chrétiens optent plutôt pour Jérusalem Est et Bethléem, pour des questions religieuses évidemment, mais surtout parce que les hôtels y sont moins chers ».
« L’activité grimpe d’environ 8 % pendant cette période… et les prix de 30 % ! » affirme-t-il sans détours.
Joëlle Leclaire, strasbourgeoise, fait partie de ces Français qui ont décidé de venir célébrer Pessah en Israël « pour le soleil et la lumière » explique-t-elle en riant et « pour avoir moins de travail à la maison ». Une tradition qu’elle perpétue chaque année depuis 10 ans maintenant. Elle a choisi de venir à Tel-Aviv pour « prendre de véritables vacances » et parce qu’elle « ne [se] définit pas comme religieuse ». Elle déplore tout de même que Pessah soit « de moins en moins une fête de famille puisque beaucoup de gens choisissent de partir le fêter à l’étranger, souvent sans emmener leurs enfants ».
 Pour Mme Zouari, fêter Pessah en Israël rime surtout avec facilité. « Ici on peut aller au restaurant ou chez le traiteur sans se poser de question alors qu’en France les restaurants casher seront fermés à cette période ». Elle a choisi de célébrer le seder en famille à Ashdod, où elle possède une maison.
Schmuel Zurel, directeur de l’Association des hôtels israéliens, confirme que la période de Pessah est particulièrement chargée pour les hôtels qui « enregistrent en moyenne des réservations pour 10 à 14 nuitées ».
« Les établissements organisent généralement un grand Seder dans une salle commune mais certains touristes préfèrent demander une salle privative. On peut donc parfois compter jusqu’à 12 sedarim différents le même soir ! », raconte-t-il.

A droite, ou à gauche

 Pour Gilles Perez, guide et organisateur de séjours en Israël depuis plus de 25 ans, les touristes qui choisissent de célébrer la Pâque juive en Israël, sont « une population majoritairement juive traditionaliste qui veut fêter Pessah dans une ambiance qui rappelle la tradition ». C’est également en grande partie grâce au climat à cette période « particulièrement clément et agréable », poursuit-il.

« On observe une différence dans la manière de voyager entre les catholiques, qui viennent généralement en Israël avec leur paroisse dans le cadre exclusif du pèlerinage, et les orthodoxes qui combinent plus facilement voyage tout compris (« package ») et pèlerinage.
 Du côté juif, la formule qui a le plus de succès est celle qui inclut uniquement les petits-déjeuners et le Seder, pas le « package de Pessah complet » incluant tous les repas, étant donné qu’il est facile de manger casher partout », explique-t-il.
« C’est une période exceptionnelle car elle est commune à trois calendriers religieux : le juif, le catholique et l’orthodoxe. Il est étonnant de voir autant de pèlerins au même endroit qui se croisent sans se voir : il y a ceux qui, à la porte de Jaffa, prendront directement à gauche et ceux qui prendront à droite », résume-t-il dans une jolie formule. Et c’est aussi beau de voir tous ces croyants ne parlant pas la même langue, mais tous mus par la foi.
Alors… L’année prochaine à Jérusalem ?