Réflexions au lendemain de Kippour

La haine antisémite n’est pas près de s’éteindre. Surtout pas en Europe du Nord

Une manifestation du mouvement néonazi, Nordfront, en Suède (photo credit: AFP PHOTO)
Une manifestation du mouvement néonazi, Nordfront, en Suède
(photo credit: AFP PHOTO)
Il se passe de bien curieuses choses dans les paisibles monarchies du nord de l’Europe. Ainsi Le Figaro du 29 septembre : « Le Danemark a déployé des soldats aujourd’hui, premier jour de célébration de la fête juive de Yom Kippour, devant l’ambassade d’Israël et la grande synagogue de Copenhague », et ajoute que c’est « une première depuis la Seconde Guerre mondiale ». La troupe pour protéger les juifs ? En 2017 ? Pourquoi un tel accès de fièvre à l’approche du jour le plus solennel du calendrier juif ?
De l’autre côté du détroit de l’Øresund qui sépare le Danemark de la Suède, l’ambassade américaine demandait le même jour à ses citoyens d’éviter de se rendre à Göteborg où des troubles étaient à craindre. Nordfront, le « Mouvement de résistance nordique », parti d’extrême droite ouvertement antisémite créé en 1997, qui précise sur son site Internet que ses inspirations idéologiques viennent avant tout d’Adolf Hitler, avait annoncé son intention d’y organiser une grande marche le 30 septembre. La police avait donné son accord et avalisé l’itinéraire prévu initialement qui passait tout près de la grande synagogue de la ville. Une décision qui avait mis la population juive en émoi. Comment les personnes âgées, les survivants de l’Holocauste, et même les familles avec de jeunes enfants, pourraient-ils affronter, en se rendant à la prière, des fanatiques néonazis ? Et si certains d’entre eux décidaient de faire un détour par la synagogue ? Saisi par les représentants de la communauté, le tribunal administratif a ordonné un changement d’itinéraire pour éloigner les manifestants de la synagogue. Une décision que le parti ne s’est pas engagé à respecter… ce qui a conduit la police à dépêcher des renforts pour assurer l’ordre public. De nombreux commerçants ont décidé de baisser leurs rideaux de fer et de clouer des planches de bois sur leurs devantures pour se prémunir contre les casseurs. Des contre-manifestations étaient prévues et il fallait s’attendre à des heurts violents.
C’est ce qui s’est produit. En fin de compte, le pire aura été évité : seulement deux blessés et quelques dizaines d’arrestations. Le Nordfront, battant en retraite deux heures après l’horaire programmé pour la fin de la manifestation, a juré de revenir. Evidemment, les événements de la journée auraient pu être évités : il aurait suffi d’une interdiction pure et simple. Mais le Mouvement de résistance nordique, qui prône la révolution – par le sang s’il le faut – est parfaitement légal. Même si, selon son manifeste, il ne reconnaît pas la légitimité du gouvernement suédois. L’extrême tolérance, pour ne pas dire la mansuétude suédoise est bien connue : chaque année des mouvements d’extrême droite obtiennent l’autorisation de venir manifester bruyamment devant la grande synagogue de Stockholm le 27 janvier, lors de la cérémonie solennelle de commémoration de l’Holocauste. A l’heure où les derniers nazis nonagénaires quittent enfin la scène, il est effrayant de constater à quel point la haine du juif est toujours vivace et inspire de nouvelles générations.
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